Guy Madison

On connaît les photos de ces «pin-up» à la Betty Grable que les GI’s collaient sur le mur de leurs chambrées ou le cockpit de leurs avions. Mais, dès les années 50, cet usage eut son pendant masculin. Le premier acteur dont le «sex-appeal» est ainsi mis en avant est sans doute Guy Madison, né le 19 janvier 1922. Une série de photos, où on le voit souvent en maillot de bain, de ce beau garçon à la mâchoire carrée et au regard langoureux, ne tardent pas à en faire un «pin-up boy» dont raffole le public féminin. C’est un agent artistique, Henry Willson, qui lui donne sa chance. Ce «talent scout» se spécialise dans la découverte de jeunes premiers séduisants, comme Rock Hudson ou Tab Hunter. Débutée en 1944, la carrière de Guy Madison se place sous l’égide du western. Ce sont bien, en effet, les 113 épisodes de la série télévisée «The adventures of Bill Hickok» (1951/58), où l’acteur incarne le fameux chasseur de bisons, qui fondent sa popularité auprès du public américain. On le voit d’ailleurs aussi dans d’autres séries westerns très appréciées, comme «La grande caravane» (1957) ou «Les aventuriers du Far West» (1960).

Mais Guy Madison manie aussi le revolver sur le grand écran. Il tourne ainsi d’excellents westerns, dont «La charge sur la rivière rouge» (1953), de Gordon Douglas, où il campe un ancien militaire chargé de retrouver des jeunes filles retenues prisonnières par les Indiens, «La poursuite dura sept jours» (1953), de David Butler, qui maintient Guy Madison sous l’uniforme, celui d’un médecin militaire obligé de prendre la tête d’un détachement, ou encore «La charge des tuniques bleues» (1955), de Anthony Mann, qui le voit incarner un capitaine forcé de composer avec un colonel désireux de vaincre à tout prix les Indiens. Ces seuls films suffiraient à prouver qu’il n’est pas seulement une gravure de mode. Ils montrent sa capacité à exprimer toutes les facettes de personnages souvent complexes.

Cet acteur d’instinct sait habiter l’écran d’une véritable présence. Sa participation à d’autres genres que le western ne fait que confirmer ce talent. Il en manifeste toute l’étendue dans «Amoureuse» (1946), de Edward Dmytryk, où il joue un soldat rentrant de la guerre et devant se réadapter à la vie civile ou dans «On ne joue pas avec le crime» (1954), de Phil Karlson, où, en compagnie de trois amis, il planifie le braquage d’un casino. Il tire aussi son épingle du jeu en mari d’une femme névrosée, Jean Simmons, dans «L’impudique» (1955), de Philip Dunne. À noter encore le rôle de Guy Madison dans «L’archange de Brooklyn» (1948), de William Castle, l’une de ses rares incursions dans la comédie.

Malgré ces rôles en vedette, Guy Madison, qui ne le souhaitait d’ailleurs pas, n’accède pas vraiment au statut de star. Et, comme, au début des années 60, sa carrière tend à s’essouffler, il se tourne vers l’Europe. Il y collabore surtout avec des réalisateurs italiens, apparaissant dans des péplums, comme «L’esclave de Rome» (1960), de Sergio Grieco, des films d’aventures, comme «Le trésor de Malaisie» (1964), de Luigi Capuano, des westerns spaghettis, tel «Le retour de Django» (1966), de Osvaldo Civirani ou encore des films de guerre, comme «Tête de pont pour huit implacables» (1967), de Alfonso Brescia. Ces petits films de genre ne pouvaient rien ajouter à sa carrière. Sans doute un peu lassé par ce cinéma du samedi soir, il se consacre à la télévision, dès la fin des années 70, et se retire finalement dans son immense ranch californien. C’est à Palm Springs qu’il décède, des suites d’un emphysème, le 6 février 1996.

© Jean-Pascal LHARDY