Cheick Fantamady Camara

Cheick Fantamady Camara, né le 12 mars 1960 à Conakry en Guinée où il suit sa scolarité. Il reste une figures majeures du cinéma africain contemporain. Son œuvre se distingue par une exploration profonde des tensions entre tradition et modernité, ainsi qu’une critique acerbe des enjeux politiques et sociaux de son pays.

Dès son adolescence, Cheick Fantamady Camara nourrit une passion pour le cinéma. Dans les années 1980, il se rend à Ouagadougou, au Burkina Faso, pour intégrer l’INAFEC (Institut Africain d’Éducation Cinématographique), la seule école de cinéma d’Afrique subsaharienne à l’époque. Faute de moyens financiers, il se forme sur le terrain, collaborant comme assistant réalisateur sur des films tels que: «L’enfant noir» (1994) de Laurent Chevallier, «Macadam tribu» (1995) de Zeka Laplaine, «Dakan» (1996) de Mohamed Camara et «La genèse» (1998) de Cheick Oumar Sissoko, avec Sotigui Kouyaté. En 1997, Cheick Fantamady Camara poursuit sa formation en France. Il suit un cursus en écriture de scénario à l’Institut national de l’audiovisuel (INA), puis se spécialise en réalisation cinématographique à l’École nationale supérieure Louis-Lumière.

En 2000, Cheick Fantamady Camara réalise son premier court-métrage, «Konorofili», qui aborde les relations complexes entre l’Afrique et l’Europe à travers le prisme de deux amis à Paris. Ce film reçoit de nombreaux prix dans plusieurs festivals, marquant le début de sa reconnaissance internationale. Il enchaîne avec «Bè kunko» (2004), un court-métrage qui explore les traumatismes de la guerre et de la violence sur les jeunes réfugiés. En 2006, il réalise son premier long-métrage, «Il va pleuvoir sur Conakry». Ce film raconte l’histoire de Bibi, un jeune caricaturiste travaillant pour un journal d’opposition, et de son conflit avec son père, imam de la grande mosquée de Conakry. À travers cette fiction, le réalisateur critique les dérives politiques et religieuses qui gangrènent la Guinée. Le film remporte le Prix du Public au FESPACO 2007, ainsi que le Grand Prix au Festival Vues d’Afrique de Montréal, consolidant la place de Camara sur la scène cinématographique internationale. En 2010, il entame le tournage de son second long-métrage, «Morbayassa», avec Alex Ogou et Fatoumata Diawara, qui sera achevé en 2014. L’histoire de Bella, une danseuse guinéenne à Dakar, tentant d’échapper à un réseau de prostitution pour retrouver sa fille au Mali. À travers ce drame, Cheick Fantamady Camara aborde les thèmes de l’exploitation, de la liberté et des liens familiaux. Le film est sélectionné au FESPACO 2015, témoignant de la continuité de son engagement cinématographique.

Outre sa carrière de scénariste-réalisateur, Cheick Fantamady Camara est également enseignant à l’Institut Supérieur des Arts Guinéens de Conakry, transmettant ainsi sa passion et son savoir-faire aux jeunes générations. En 2006, il fonde la société de production et de distribution «Conakry Ouagadougou Paris Films», visant à faciliter la circulation des œuvres africaines. Le grand cinéaste décède prématurément le 6 janvier 2017 à Paris, à l’âge de 56 ans. Son œuvre, marquée par une quête incessante de justice sociale et une volonté de donner une voix aux sans-voix, demeure un héritage précieux pour le cinéma africain et mondial.

© Philippe PELLETIER