William S. Hart

Né le 6 décembre 1864, William S. Hart est l’un des grands pionniers du western. Son regard d’acier, qu’il fixe sur le spectateur avec une intensité magnétique, l’a rendu célèbre. Comme aussi son visage de marbre et cette expression sévère qui donnaient au cowboy incarné par William S. Hart une épaisseur dramatique inusitée. Cette profondeur, le comédien la tenait de la scène. Avant d’aborder le cinéma, en effet, il acquiert, dans les années 1890, une solide expérience d’acteur de théâtre. Dans des troupes comme celle du comédien Lawrence Barrett, il se frotte aux rôles du répertoire et donne toute sa mesure dans les personnages de Shakespeare.

Il vient au cinéma au milieu des années 10 et se fait un nom dans le western. Pour lui, ce n’est pas un simple divertissement. Passionné par le Far West et la conquête de l’Ouest, il veut reconstituer ce monde disparu de la manière la plus réaliste possible. Et, pour mieux le connaître, il puise à bonne source: en effet, il s’est lié d’amitié avec Wyatt Earp, le fameux marshall qui, avec ses frères, participa au mythique «règlement de comptes à OK Corral», fusillade qui eut lieu à Tombstone, en Arizona, le 26 octobre 1881. Le célèbre shérif donne de précieuses informations à William S. Hart, qui veille toujours à ce que les costumes, les accessoires, et jusqu’au moindre détail du décor, soient le plus authentiques possible. Dès 1914, l’année de ses vrais débuts, il est en vedette dans «Le serment de Rio Jim» (1914), de Reginald Barker , et passe aussitôt après à la mise en scène, en dirigeant son premier film, «Two-gun Hicks». Dès lors, il enchaîne, tout au long de l’année 1915, toute une série de films courts, souvent produits par un autre grand précurseur, Thomas H. Ince, et distribués par la Mutual. Dans ces films, William S. Hart incarne tous les protagonistes qui ont nourri l’épopée de l’Ouest, des shérifs, des prospecteurs ou des bandits. Mais il est devenu si populaire, dans son pays et ailleurs, qu’il transcende peu à peu tous ses rôles pour ne plus personnifier, à l’écran, qu’un seul personnage, nommé Rio Jim en France.

En 1916, l’acteur rejoint la «Famous-Players-Lasky», dirigée notamment par Adolphe Zukor et devant se transformer plus tard en une des plus grandes «majors», la «Paramount». Monté sur Fritz, son célèbre cheval Pinto, dont la robe tachetée devient inséparable du cowboy taciturne campé par William S. Hart, le comédien dirige alors des westerns plus longs et plus ambitieux. Dans «The dawn maker» (1916), où il incarne un métis, il dépeint les Indiens avec bienveillance, et il campe un prédicateur dans «L’apôtre de la vengeance» (1916). Dans les années 20, cependant, l’étoile de William S. Hart pâlit. Le public finit par se lasser de ses héros un peu rudes et de ses histoires souvent moralisatrices. Il lui préfère un autre cowboy mythique, Tom Mix, auquel son grand chapeau, son foulard artistement noué et ses chemises «western» donnent plus de séduction. D’autant qu’il est plus souriant et qu’aidé par son fidèle cheval Tony, il multiplie les chevauchées et les scènes d’action.

Un peu amer, William S. Hart tourne un dernier film, «Le fils de la prairie» (1925), qu’il produit, et qui relate la course organisée dans l’Oklahoma, en 1889, pour attribuer les terres de ce territoire aux colons accourus en foule. Après quoi, il abandonne le cinéma et se retire dans son vaste ranch de Newhall, en Californie, transformé depuis en musée. C’est là qu’il rend son dernier soupir, le 23 juin 1946.

© Jean-Pascal LHARDY