Roy Rogers

Si vous ne deviez retenir qu’un seul nom de cowboy chantant, ce serait sans doute celui de Roy Rogers. Est-ce son visage avenant, sa veste à franges ou son fameux cheval Trigger, à la crinière Blanche? Quoi qu’il en soit, on se souvient de lui, alors qu’on a un peu oublié Tex Ritter et même Gene Autry. Et Roy Rogers était si célèbre qu’il ne pouvait interpréter à l’écran d’autre personnage que lui-même. À partir de la fin des années 30, et jusqu’à la fin de sa carrière, il est donc tout simplement Roy Rogers dans la plupart de ses films. Jouer un cowboy qui porte le même nom que l’acteur qui l’interprète, c’est tout de même assez fascinant!

Cette popularité, Roy Rogers, né Leonard Franklin Slye, à Cincinnati, le 5 novembre 1911, la doit avant tout à ses talents de musicien et de chanteur. Grand admirateur de Jimmy Rodgers, le père de la musique country, Roy Rogers apprend à maîtriser le «yodel», cette technique de chant où l’on passe sans transition de la voix normale à la voix de tête. Cette façon de chanter «à la tyrolienne» est une part essentielle de la musique country et fait partie du répertoire des cowboys chantants. Roy Rogers intègre d’abord le groupe country des «Rocky mountaineers», puis, avec Bob Nolan (remplacé par Tim Spencer) et Bill «Slumber» Nichols, forme, en 1934, le premier trio de yodleurs, baptisé d’abord «The Pioneers», puis «The sons of the pioneers». À partir de 1935, c’est avec son groupe qu’il est engagé par le studio Republic pour assurer la partie musicale de westerns de série, réalisés par Joseph Kane ou George Sherman. Mais sa carrière de cowboy chantant débute vraiment en 1938, quand, remplaçant Gene Autry, il apparaît, pour la première fois, sous le nom de Roy Rogers, dans le film «Le cow-boy chantant», de Joseph Kane. Dès lors, son personnage se fixe: un grand chapeau blanc, des vêtements colorés, sa guitare en bandoulière, et, le suivant partout, son cheval Trigger et son chien-loup Bullet.

Si bien que, dès la première image, les spectateurs, et les enfants les premiers, reconnaissent leur fidèle ami Roy Rogers. Pendant deux décennies, l’acteur, souvent accompagné de sa femme, Dale Evans, promène cette silhouette familière de film en film. Ses metteurs en scène attitrés sont Joseph Kane, avec qui il tourne le plus, et William Witney. Dans ces films ou sur disque, Roy Rogers, parfois en compagnie de Dale Evans, chante des airs comme «Happy trails», «Cool water», enregistrée en 1947, «Pecos Bill», qui date de la même année, ou encore «tumbling tumbleweed», un des grands succès de «The sons of the pioneers» (1942). Cette musique de western classique suit les traces de Gene Autry, sans emprunter le style plus personnel d’un Hank Williams, l’un des piliers de la country, et encore moins la veine revendicatrice des Johnny Cash et autres Willie Nelson.

Délaissant parfois son propre personnage, Roy Rogers a aussi incarné des héros mythiques de l’Ouest: il campe ainsi le fameux Billy the Kid dans «Le retour de Billy le Kid» (1938), puis prête vie à Buffalo Bill dans «La jeunesse de Buffalo Bill» (1940), avant d’interpréter Jesse James dans «Le brigand au cœur d’or» (1941). Dans les trois films, il est dirigé par l’inévitable Joseph Kane. À la fin des années 50, l’acteur et sa femme se tournent vers la télévision, où ils ont leur propre émission: «The Roy Rogers and Dale Evans show». Toujours très populaire, il s’éteint le 6 juillet 1998 dans sa maison californienne.

© Jean-Pascal LHARDY