Jean-Paul Le Chanois

Jean-Paul Le Chanois, né le 25 octobre 1909, est surtout connu, pour ses deux sympathiques comédies, «Papa, maman, la bonne et moi» (1953) et «Papa, maman, ma femme et moi» (1955), avec Robert Lamoureux et Gaby Morlay, qui racontent le quotidien d’une famille de Français moyens. Mais il eût sans doute préféré que les gens se souviennent de lui pour les films où s’expriment ses convictions progressistes. En effet, il adhère au parti communiste en 1933 et participe au groupe Octobre, proche du Front populaire et animé par Jacques Prévert. Il lui écrit son premier texte (le sketch «Vive la presse») et, en février 1933, participe, avec les membres du groupe, au festival du théâtre ouvrier à Moscou. Peu après, Jean-Paul Le Chanois devient secrétaire général de la Fédération du théâtre ouvrier français.

Cette vision du monde et de l’homme se retrouve dans nombre de ses films, à commencer par le premier, «La vie est à nous» (1936), un film collectif, réalisé, à l’initiative du parti communiste, par Le Chanois, Jean Renoir et d’autres réalisateurs. Toujours patronné par les communistes, «Le temps des cerises» (1937) s’inscrit dans la même veine et traite de ce que le film présente comme l’exploitation des ouvriers par le système capitaliste. Durant la guerre, les origines juives de Jean-Paul Le Chanois (son vrai nom est Dreyfus) l’obligent à cesser ses activités. Pour vivre, il écrit des scénarios sous un autre nom pour la firme allemande Continental, qui fera travailler, sous la direction avisée d’Alfred Greven, de nombreux acteurs et réalisateurs français. Entré en Résistance, le cinéaste est le premier dirigeant, en 1943, du Comité de libération du cinéma français, qui filme les maquis. Renonçant aux films de propagande, Jean-Paul Le Chanois signe, après la guerre, des œuvres dont le message, plus subtil, véhicule toujours des idées de gauche. C’est le cas de «L’école buissonnière» (1948), avec Bernard Blier.

À partir des années 1950, cette sensibilité progressiste se fait plus discrète. On la retrouve néanmoins dans un film de 1950, «Sans laisser d’adresse», avec un Bernard Blier toujours aussi remarquable, où des chauffeurs de taxis se mobilisent pour empêcher une jeune femme désespérée de se suicider. Toujours sensible aux méthodes innovantes, il présente un médecin préconisant l’accouchement sans douleur dans «Le cas du docteur Laurent» (1956), avec Jean Gabin. À côté de ces films empreints d’une véritable sensibilité sociale, les autres font un peu pâle figure, il faut bien le dire. Le Chanois connaissant son métier, ce sont des films bien faits, à tous points de vue, mais sans autre ambition que de divertir les spectateurs du samedi soir. Dans cette catégorie, on peut ranger «Agence matrimoniale» (1951), avec l’acteur fétiche du cinéaste, Bernard Blier, qui conte les déboires d’un employé de banque héritant de l’agence du titre, «Mandrin» (1962), avec Georges Rivière, ainsi que deux films taillés sur mesures pour un Jean Gabin vieillissant: «Monsieur» (1964) et «Le jardinier d’Argenteuil» (1965).

Scénariste réputé, notamment de films de Maurice Tourneur, comme «La main du diable» (1942) ou «Impasse des deux anges» (1948), Jean-Paul Le Chanois a également réalisé des documentaires, où s’expriment ses convictions personnelles, comme «La vie d’un homme» (1937), consacré au dirigeant communiste Paul Vaillant-Couturier, ou «Au cœur de l’orage (1944), qui raconte l’épopée du maquis du Vercors. Jean-Paul Le Chanois disparaît le 8 juillet 1985.

© Jean-Pascal LHARDY