Jacques Martial

C’est à Saint-Mandé, en région parisienne, le 7 novembre 1955, que Jacques Martial voit le jour dans une famille de parents guadeloupéens. Marqué dès l’enfance par les affectations militaires de son père, il grandit entre Madagascar, le Congo, la Guyane, mais conserve toujours un attachement profond à la Guadeloupe, patrie de ses origines. C’est là qu’il goûte aux récits familiaux chargés de mémoire, notamment ceux de ses grands-parents ayant vécu l’esclavage. À Kourou, en Guyane, il découvre au théâtre un lieu de liberté et d’expression. À Paris, il se forme à l’atelier de Sarah Sanders, avant de devenir son assistant. Il enseigne les classiques: Racine, Shakespeare, Jean Giraudoux, mais aussi les contemporains comme Aimé Césaire, Bernard‑Marie Koltès ou Jean‑Louis Bourdon.

Jacques Martial commence sa carrière au cinéma en 1981, dans «Le maître d’école» de Claude Berri, aux côtés de Coluche. Par la suite, il travaille avec des noms comme Claire Devers pour «Noir et Blanc» (1985); Samuel Fuller «Sans espoir de retour» (1988); John Berry «Il y a maldonne » (1986); Robert Kramer «Walk the walk» 1996); Pascal Légitimus «Antilles sur Seine» (2000). Il devient célèbre en incarnant l’inspecteur puis lieutenant Jean‑Philippe «Bain‑Marie» dans 98 épisodes de la série «Navarro », aux côtés de Roger Hanin. Devenu l’une de ses figures emblématiques, il quitte la série en 2007. Parallèlement, il prête également sa voix à de grandes figures du cinéma américain comme Denzel Washington, Wesley Snipes, Ving Rhames, Samuel L. Jackson, Will Smith, Laurence Fishburne, Forest Whitaker et bien d’autres. En 2000, Jacques Martial crée sa propre troupe, «La Comédie Noire», afin de promouvoir les comédiens noirs et les cultures ultramarines dans le paysage théâtral français. Il porte la parole d’Aimé Césaire à travers le monde, notamment avec la pièce poétique «Cahier d’un retour au pays natal» qu’il met en scène et interprète en français et en anglais. Il se produit en Martinique, Guadeloupe, Singapour, Australie, New York, le Festival d’Avignon, La Réunion, la Nouvelle‑Calédonie... Il joue pour Césaire en personne, un moment qu’il qualifie de «grâce».

Nommé par Jacques Chirac, Jacques Martial devient président de l’Établissement public du parc et de la Grande halle de la Villette, alors l’une des plus grandes institutions culturelles françaises. Il en fait un lieu interculturel, créant entre autres une saison créole et le WIP Villette, un espace dédié aux expressions diverses. Le 15 juin 2015, il devient président du Mémorial ACTe, le nouveau centre caribéen dédié à la mémoire de la traite et de l’esclavage inauguré le 7 juillet en Guadeloupe. Il y lie mémoire historique et création artistique, confiant que ce projet a éveillé en lui une véritable mobilisation. En 2020, il entre en politique locale, il est élu conseiller de Paris le 28 juin, délégué chargé des Outre‑mer. Puis en novembre 2022, il est nommé adjoint à la maire de Paris, Anne Hidalgo, en charge des Outremers.

Le 13 août 2025, Jacques Martial s’éteint à 70 ans à Paris, des suites d’une longue maladie. La maire de Paris Anne Hidalgo salue en lui «un grand homme de théâtre, de cinéma et de télévision», engagé pour la mémoire de l’esclavage, la valorisation des cultures ultramarines, et la visibilité des artistes noirs. Il est le frère cadet de l’acteur Jean-Michel Martial (1952/2019), ancien président du Conseil représentatif des Français d’outre-mer.

© Philippe PELLETIER